Christian BEZIAU Ecrivain

Romans publiés sur Amazon

LE CHEIKH EST MAT

Extrait

     

Ne voulant pas lui donner trop de précisions sur mon enquête, je lui promets néanmoins qu’il sera le premier à qui je me confierai si j’ai du nouveau. Comblé, il me quitte et j ‘en profite pour en  faire autant, mais de mon côté. Car là où je vais, je ne tiens pas à ce qu’il vienne mes mettre des bâtons dans les roues et entraver mon action.

Un quart d’heure plus tard, je rejoins mon guetteur qui s’est réinstallé à son poste de vigie, non loin du bazar.
    • Je suis revenu ici, ça fait moins d’une heure. Rien à signaler.
    • Tu t’es absenté combien de temps ?
    • J’ai laissé la caisse ici, pour éviter qu’on me pique la place quand je reviendrai, disons que je me suis absenté deux heures et demi à  trois heures. Pas plus, vous savez.

Alors qu’il a planqué tant de temps, s’il s’est réellement passé quelque chose, c’est certainement au cours de sa pause. Je ne peux pas lui dire ça. Je pense que maintenant, je n’ai plus besoin de lui, autant qu’il aille finir la nuit chez lui.
    • C’est bon, tu peux t’en aller chez toi. Je vais prendre seul le quart. Soit tout de même là demain matin vers six heures.
    • C’est chic monsieur le commissaire. Justement ce soir, ma femme a prévu……….
    • Allez, va retrouver ta bourgeoise et embrasse-la de ma part.

Il s’en va et j’en profite pour mettre ma voiture à sa place.

Attendre ! Je reste là à observer le bazar et ses alentours, car j’ai en moi une petite voix qui me dit qu’il va se passer quelque chose prochainement. Ce n’est pas par hasard sur le barbu est revenu aujourd’hui. Il doit encore mijoter un feu d’artifice en se servant des deux engins qui sont dans la cave. Contre qui ? Et Quand ? Généralement, lorsqu’il arrive c’est toujours dans les deux jours que ça pète.

Alors que je fais cet examen de conscience, j’aperçois quelqu’un sortir de l’immeuble. Une femme qui sort les poubelles, sans doute celles qui séjournent le reste du temps dans la courette. Elles les alignent le long du mur de l’immeuble en vérifiant si le couvercle est bien fermé, puis rentre dans l’immeuble. Au premier étage, des lumières éclairent deux pièces, une seule pièce est éclairée au second et aucune dans les étages supérieurs. Tout est bien calme dans cette rue. La nuit risque d’être bien longue si rien ne se passe. Je risque de m’endormir. Je baille sans savoir si c’est de fatigue ou si c’est parce que j’ai faim.

Soudain, ma portière s’ouvre et je me trouve nez à nez avec un pistolet semi-automatique Glock, en calibre 45. Je connais bien ces joujoux. Ils sont construits dans un matériau ultra léger avec système de compensation qui en fait une arme des plus efficaces. J’aurais aimé que notre service en soit doté, mais avec les exigences administratives cela prend du temps. Et du temps ! J’ai l’impression à voir la tête de celui qui tient l’arme, j’en plus beaucoup pour me poser des questions stupides.
    • Descends.

Comment résister devant une telle invitation !

Une fois dehors, un autre individu que je n’avais pas encore remarqué se place derrière moi et me fouille. Mon portefeuille et mon arme changent immédiatement de place pour finir dans la poche droite de sa veste.
    • Avances.

Avec des gens comme eux, j’ai le sentiment que nous allons avoir des moments historiques de discussion. Tant la précision de leurs mots est simple et précise. Par respect à cette littérature, je ne pose aucune question me contentant de faire exactement ce qu’ils attendent de moi.

Nous traversons la rue, toujours aussi déserte et entrons dans l’immeuble. Je n’ose leur avouer que je connais déjà un peu les lieux. Mais au lieu de nous rendre dans le fond du couloir en impasse, je suis poussé pour monter par l’escalier. Le premier étage est notre niveau d’arrivée. Celui qui m’a soulagé de mes affaires vont frapper doucement à une porte. Quelqu’un lui parle au travers et finit par ouvrir. Nous entrons tous les trois à la queue leu leu, moi au milieu, bien escorté. La première pièce est une petite salle avec table, buffet, chaises, une vraie salle à manger. Dans la seconde, éclairée grâce à la lumière de la salle, deux lits jumeaux et une armoire. D’une autre pièce communiquant avec la précédente la porte s’ouvre livrant le passage à un homme. Je le reconnais tout de suite : cheikh Sidi Ben Oit en personne. Il n’a pas son fameux burnous, mais est seulement revêtu d’une djellaba et d’une sorte de petit bonnet en tissus brodé.

    • Commissaire Rouillon ! Quel honneur de vous recevoir ici, chez nous.
    • J’ai déjà été plus mal reçu, Sidi Ben Oit.

Le cheikh semble contrarié que je le connaisse. Il s’attendait sans doute au contraire.
    • Je vois que vous me connaissez. Dans ce cas, cela va simplifier ce que j’attends de vous.
    • Vous savez, j’ai déjà pas mal de boulot en ce moment, je ne sais si je peux vous aider.

Le cheikh rit de bon cœur devant ses acolytes qui n’ont tien compris à ma réplique. Il poursuit :
    • J’ai compris que vous étiez sur ma trace lorsque mes hommes m’ont signalé qu’ils étaient surveillés. Comme je n’ai pas de temps à perdre, j’ai fait prendre immédiatement les mesures qui s’imposaient.
    • Vous voulez parler de l’homme que vous avez fait tuer près de la mosquée ?
    • Oui. Grâce à lui ou plutôt à ce qu’il avait, nous avons su  que vous étiez dans le coup. Nous avons fait développer le contenu de l’appareil photo. Il s’agit de clichés me représentant et représentant quelqu’un d’autre que vous connaissez bien sûr. C’est d’ailleurs lui qui nous a dit que vous étiez également sur l’affaire.

Je pense à Mohamed et à son cousin. Moi qui avais confiance en eux. Les petits salopards sont allés me vendre au cheikh.

Toujours debout et bien encadré je ne peux rien faire pour tenter quoi que ce soit. D’ailleurs, je ne pense pas qu’ils voudraient tous les trois me liquider, sinon ils l’auraient fait en me surprenant dans la voiture tout à l’heure. C’est le cheikh qui me fournit cette première réponse.
    • Commissaire Rouillon ! J’ai une mission d’importance à accomplir et je ne voudrais pas montrer à tous ceux qui me font confiance que je ne peux la réaliser. Aussi, je voudrais savoir ce que vous connaissez dans cette affaire. Si vous vous montrez coopérant, il se peut que vous gardiez la vie sauve, sinon vous m’êtes d’aucune utilité.
    • Tout ce que je peux vous dire, c’est que vous et votre clique, vous êtes de franchement cons de pouvoir penser que votre organisation de merde peut se servir de mon pays comme plate-forme pour régler vos comptes.

Il ne prend pas ombrage aux insultes que je viens de lui balancer. Il est beau jouer le barbu et il sourit.
    • Dans toute partie, il faut savoir se montrer élégant vis à vis de son adversaire. J’ai l’impression que vous ne comprenez pas bien la situation dans laquelle vous vous trouvez actuellement. J’ai déjà réduit vos effectifs et je vous tiens à ma merci. Qu’espérez-vous ? L’arrivée de la grande cavalerie pour vous en sortir.

Je commence à douter de mes capacités tout d’un coup. Il me tient dans sa main. Après tout, il a déjà démontré qu’avec ou surtout sans moi, il pouvait faire exploser ses bombes. Alors aujourd’hui, qu’est-ce qui peut l’en empêcher ?
    • Je suis navré pour vous, commissaire. – Puis, il s’adresse à ses gorilles en arabe. Juste quelques mots sur un ton très autoritaire. Je n’ai pas le temps d’entendre la fin de sa phrase que je m’écroule. Je viens de recevoir un violent coup de matraque derrière la tête. Des milliers d’étoiles entourent un éclair et puis plus rien.

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